Patrick
2013-08-26 12:40:53 UTC
Si des gaz neurotoxiques ont bien été utilisés mercredi près de Damas, les inspecteurs de l'ONU devraient facilement pouvoir en trouver des traces et les identifier à condition de pouvoir prélever des échantillons sur le site de l'attaque présumée et sur les victimes, assurent des experts interrogés par l'AFP.
"Ca ne devrait pas poser de problème, surtout si ce sont des molécules de type sarin ou des choses connues", estime Pascal Klintz, toxicologue et expert médico-légal français.
"Si les inspecteurs de l'ONU font des prélèvements corrects, de sang, d'urine, dans les tissus gras où ça se fixe, et également sur les vêtements, il n'y aura aucune difficulté analytique à faire ce genre d'investigations, même avec des délais particulièrement longs", assure-t-il à l'AFP.
Même cinq jours après l'attaque présumée, "il y a de bonnes chances de trouver du sarin et ses dérivés dans le sol, des munitions explosées et des fluides corporels comme le sang et l'urine", renchérit le Dr Alastair Hay, spécialiste en toxicologie de l'Université britannique de Leeds.
"Chez certains individus qui ont été sévèrement intoxiqués, on peut encore trouver des traces de sarin jusqu'à six semaines après l'exposition", affirme le Dr Hay, qui étudie les effets des armes chimiques depuis plus de trente ans.
"Dans l'environnement, la marge est encore bien plus importante. Lors d'une enquête que j'ai menée au Kurdistan irakien, nous avons trouvé, quatre ans après, du gaz moutarde, du gaz neurotoxique et leurs dérivés dans le sol prélevé à l'endroit où les munitions avaient explosé", insiste l'expert britannique.
Tout dépendra donc de la latitude dont bénéficieront les experts internationaux en Syrie pour mener leurs investigations.
"S'ils ont librement accès à la zone, et qu'ils peuvent y faire ce qu'ils veulent, je pense qu'ils ont de bonnes chances de trouver des preuves qui nous permettront de mieux comprendre ce qui s'est passé", juge aussi Ralf Trapp, consultant indépendant qui fut de 1998 à 2006 expert à l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) de La Haye.
Pour lui, l'idéal serait que les enquêteurs de l'ONU puissent découvrir dans les cratères laissés par les explosion des fragments de munitions, qui leur permettraient non seulement de déterminer si elles contenaient des agents chimiques mais aussi de quel arsenal elles peuvent provenir.
"S'il s'agit de missiles ou de bombes d'aviation, la responsabilité du gouvernement syrien sera clairement engagée. S'il s'agit d'obus de mortier, il faudra essayer de déterminer la trajectoire des obus et savoir qui tenait la position (gouvernement ou rebelles), d'où ont été lancés les obus", explique Olivier Lepick, spécialiste des armes chimiques et biologiques et chercheur à la Fondation de la recherche stratégique.
Trop tard ?
Dimanche, Damas venait à peine de donner son feu vert pour l’enquête onusienne que des responsables américains et britanniques s’étaient relayés pour saper d’avance les résultats de l’enquête onusienne.
S’exprimant pour l’AFP, un responsable américain qui n’a pas été identifié a dit que le feu vert de Damas arrive "trop tard pour être crédible, notamment parce que les preuves disponibles ont été largement altérées par les bombardements continus menés par le régime et d'autres actes délibérés ces cinq derniers jours".
Même son de cloche de la part du ministre britannique des Affaires étrangères William Hague, qui sans tarder, a déclaré que ces preuves "pourraient avoir été détruites".
"D'autres preuves peuvent avoir été endommagées au cours des derniers jours et d'autres peuvent avoir été trafiquées", a-t-il prétendu.
La France a évité une telle bêtise et son ministre français s’est contenté de répéter que l’attaque chimique ne faisait aucun doute.